mardi 15 novembre 2016

V – Tout ce qui doit aller mal...

Amy arriva en retard d’un bon quart d’heure. Harry et Clyde, dans leur fourgon se demandaient si ce quart d’heure allait se répercuter sur l’heure de sortie. Ils étaient restés assis, à guetter l’arrivée d’Amy et la tension était montée petit à petit. Anxieux de ne pas la voir arriver, ils avaient déjà échafaudé toutes sortes de plans, allant du simple retard sans conséquence, jusqu’au terrible accident mortel survenu alors qu’elle traversait la route. Quand ils la virent arriver, ils furent soulagés. Mais la peur de voir leur plan capoter, pour seulement un petit quart d’heure, était toujours là. Ils avaient mis encore vingt minutes pour se décider à faire ce qui était prévu.
Sous pression, Clyde descendit du fourgon pour courir vers l’entrée du Fitness Club Olympus.
Sous pression, Harry démarra son engin pour aller le garer sur le parking, à l’arrière du bâtiment.
Si Clyde n’eut aucun problème à trouver les clés de la bâtisse, quoi qu’il les prit toutes, donc cinq trousseaux de trois tonnes chacun, et mit encore une dizaine de minutes pour fermer la porte de devant, Harry eut un peu plus de frayeur en voyant que le parking n’était pas si désert que cela. Comment avait-il pu imaginer que toute la ville irait se poser devant un match de boxe ? Amy elle-même n’y assistait pas ! Si Amy n’y assistait pas, bien entendu que d’autres n’y seraient pas !
Cela dit, ce n’était pas non plus aussi perturbant que ça en avait l’air. Harry dénombra trois voitures et fut soulagé de voir que l’une d’elle appartenait à un client du bar voisin, qui utilisait le parking du Fitness pour éviter de payer l’horodateur sur les places donnant sur la rue. Le client, qui manifestement n’avait pas bu qu’un seul verre, mit un certain temps avant de trouver ses clés. Harry pensait même à un moment qu’il allait descendre et l’aider à les trouver, le faire monter en voiture, démarrer et le conduire jusqu’à la sortie. Il n’en eut pas besoin, le gars partit, non sans quelques difficultés à faire garder la ligne droite à son véhicule et disparut dans la circulation peu dense de cette fin de journée.
Clyde apparut par la porte de derrière, celle-la même que devrait emprunter Amy dans quelques minutes. Il jeta un œil sur l’ensemble des voitures présentes et monta dans le fourgon.
– J’en ai bavé mais c’est bon ! J’ai fermé la porte de devant et j’ai balancé les clés derrière une armoire, dit-il alors.
Il jeta encore un coup d’œil sur les voitures du parking.
Qu’est-ce qu’on fait pour ceux-là ? demanda-t-il.
On attend de voir qui sort le premier.
C’est risqué, tu ne trouves pas ?
Tu as une autre idée ?
Clyde réfléchit. Trois voitures, donc au moins trois personnes. Peut-être plus, quatre ou cinq grand maximum.
On peut aller visiter les vestiaires et piquer les fringues, ils ne sortiront pas à poil tout de même.
Harry le regarda. Il se crut dans une mauvaise bande dessinée. Pour empêcher de faire sortir les nanas et les mecs du Fitness, Clyde n’avait rien trouvé de mieux que de piquer leurs vêtements.
– Appelle Armand ! Qu’il l’appelle pour lui dire qu’un truc grave s’est passé, qu’elle doit rentrer au plus vite ! proposa Harry.
Elle ne va pas se douter de quelque chose ?
J’espère que non ! On verra. Essaies.
Clyde prit le portable posé sur le tableau de bord et composa le numéro d’Armand. Celui-ci fut surpris et comprit dans un premier temps qu’il s’agissait d’un problème dans le déroulement de leur plan. Clyde lui expliqua brièvement ce dont il était question et Armand s’exécuta. Harry et Clyde sortirent du fourgon pour se diriger vers le Fitness. Depuis la porte vitrée de derrière, on pouvait voir le couloir principal qui menait de la salle de gym aux vestiaires. Si Amy tombait dans le panneau, ils la verraient se faufiler dans le couloir. À moins qu’elle n’ait pas pris son portable avec elle pendant qu’elle faisait sa gym.
Ils regardaient par la vitre. Clyde sortit une cagoule de sa poche. De la poche intérieure de son blouson, il fit apparaître un chiffon et une petite bouteille de verre avec un liquide transparent qui bougeait dedans.
Qu’est-ce que c’est ? demanda Harry.
Du chloroforme. Ça sera plus facile pour nous de la transporter si on l’endort. T’avais pas pensé à ça, tête de circuit imprimé ?
Harry fit la moue et se plaqua contre le mur lorsqu’il vit Amy passer en courant dans le couloir.
Clyde et Harry entrèrent dans le Fitness et se précipitèrent vers les vestiaires tout en mettant leur cagoule en place sur leur tête. Harry jeta un œil vers la salle de gym. Quelques péquenots étaient en train de faire leurs exercices. Clyde imbibait son chiffon de chloroforme. Ils entrèrent dans le vestiaire des dames mais ne virent personne à l’intérieur. Ils se regardèrent et se dirigèrent vers les toilettes d’où un bruit étrange leur parvenait. Ils entrèrent et trouvèrent Amy en train de vomir tout ce qu’elle pouvait dans un lavabo.
C’est à ce moment là que le portable d’Harry se mit à sonner. Amy se retourna brusquement. Et tout alla très vite. Clyde se jeta sur elle, la main renfermant le chiffon de chloroforme en avant. Il la percuta au visage dans son empressement, passa derrière elle et parvint à lui faire respirer l’alcool qui la plongea très vite dans un sommeil de plomb, sans qu’elle ait eu le temps de pousser un cri.
Harry, lui, se débattait pour trouver son portable et décrocher aussi vite qu’il le pouvait. Le téléphone eut largement le temps de sonner quatre fois de suite avant qu’il n’appuie sur la touche lui permettant de prendre la communication.
– Allo ! dit-il nerveusement. Quoi ? Tu n’as pas pu la joindre ! Ben on a cru que si et ça a failli tout faire foirer !
Clyde chargea Amy sur son épaule droite comme un sac à pommes de terre et revint dans le vestiaire. Il entrebâilla la porte pour voir si personne n’arrivait. Il comptait porter Amy dans le fourgon pendant qu’Harry se dépatouillait au téléphone. Personne en vue, il marcha précipitamment dans le couloir. L’adrénaline fusait à grande vitesse dans tout son corps. Il n’était qu’à quelques mètres de la sortie et pourtant cette dernière lui paraissait si loin, si inaccessible.
Si quelqu’un sortait de la salle de gym, il était foutu. Il accéléra le pas, sentant la folie grimper, cette peur qui prend tous les gosses lorsqu’ils ont décidé de piquer les fruits dans le verger interdit. Il la ressentait de manière décuplée. Parce que si les mômes ne risquaient qu’une engueulade, il risquait beaucoup plus, lui. Il risquait la prison !
Il parvint jusqu’à la porte, l’ouvrit et se dirigea vers le fourgon en jetant des regards partout. Il ne vit personne. Tant qu’Amy n’était pas à l’arrière du van, il ne serait pas tranquille. Il ouvrit la porte et la déposa à l’intérieur. Il referma la porte et partit retrouver Harry.
Ce dernier était encore au téléphone avec Armand, lui expliquant ce qui se passait et ce qu’ils allaient faire maintenant, à savoir attendre qu’Amy se réveille pour l’appeler. Seulement, comme Clyde l’avait assommée au chloroforme, il ne savait pas si elle serait de retour dans le monde réel pour 21h, comme prévu.
Clyde lui fit signe que tout était ok et Harry raccrocha en signalant qu’il devait y aller. Ils retirèrent leur cagoule et regardèrent à nouveau si la voie était libre avant de courir vers la sortie. Ils ouvrirent la porte et furent soudainement soulagé. Ils avaient réussi. Pas comme le plan l’avait prévu mais ils avaient pu enlever Amy.
Il leur restait à élucider un mystère cependant : où diable était passé le fourgon ?


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