Les agents Manetti
et Gordon continuaient leur tour de quartier entamé la veille. Ils
sonnaient à toutes les portes afin de poser quelques questions au
sujet des récents cambriolages perpétrés dans les environs. On en
profitait pour leur faire savoir que la situation se dégradait, que
jamais on aurait vu cela à peine 10 ans auparavant, qu’il fallait
coincer ces salauds qui dépouillaient en une heure ce que vous
gagniez en une vie, etc., etc., etc.…
Ces cambriolages
étaient ressentis comme des viols et avaient ému toute la
communauté. Le choc passé, les habitants entraient en colère et au
lieu de continuer sur le chemin du deuil, ils restaient
irrémédiablement coincés dans cette rage. Combien n’eurent
aucune crainte de leur dire :
– Qu’ils
viennent ! Ils seront reçus comme il se doit… avec du calibre
12 dans le cul !
– Vous n’avez
pas le droit, disait Manetti.
– Ils n’ont
pas le droit d’entrer chez moi pour me cambrioler et vous ne faites
rien pour ça ! Ça sera ni plus ni moins de la légitime
défense !
Et à Manetti de
la fermer. C’était comme cela dans la plupart des maisons. Le
quartier avait évolué, était devenu moins sûr, moins paisible.
Même si on continuait à raconter d’horribles choses sur le 1318.
Manetti et Gordon
remontaient justement l’allée du 1318, rue de l’acacia. Ils
sonnèrent et attendirent quelques instants. Alors qu’ils allaient
rebrousser chemin, la porte s’ouvrit sur un jeune homme que l’on
réveillait, manifestement. Il avait les yeux mi-clos mais on pouvait
tout de même voir qu’ils étaient injectés de sang. Les paupières
rouges, les cernes noirs, de la bave à la commissure des lèvres. Le
t-shirt troué, d’un vert crasseux et un jeans qui n’avait pas dû
voir le lave-linge depuis quelques siècles dégageaient une odeur
âcre qui prenait instantanément aux narines.
– Bonjour
monsieur, annonça Manetti. Nous faisons le tour du quartier pour
enquêter sur les récents cambriolages.
Doug – tout le
monde l’appelait Doug mais en réalité personne ne connaissait
réellement son nom ; il ne figurait même pas sur sa boîte aux
lettres – sourit, se gratta la tête, sourit à nouveau et balbutia
quelques mots incompréhensibles. En fait, c’était plus des
grognements que des mots ayant un sens.
– Les
cambriolages ! Oui, dit-il. Les cambriolages…
– Pouvons-nous
entrer un instant ? demanda Manetti, tentant de regarder ce
qu’il y avait derrière Doug.
Ce dernier hésita.
Il regarda chacun des policiers avant de sourire une troisième fois
et d’ouvrir sa porte pour laisser le passage aux deux agents. Ils
jetèrent des coups d’œil autour d’eux. Doug sortait une bière
de son frigo avant d’en proposer une à ses invités. Ils se
regardèrent avant de refuser.
– On nous a
signalé un fourgon gris rodant dans les parages, vous avez remarqué
quelque chose ? demanda Manetti.
Doug, toujours
souriant, ricanant même (on n’aurait su dire s’il était
bourré ou shooté. Quoi qu’il en soit, il avait tout le mal du
monde à tenir en équilibre) :
– Non !
Vous savez… je vis dans le noir. Et la plupart du temps, je suis
pété à la bière et au canna. Même là, je ne suis pas sûr
d’avoir les neurones en place.
– Vous êtes
toujours présent chez vous ?
– En quelque
sorte… mais…
Doug déglutit et
fit signe aux policiers d’attendre. Il disparut dans la pièce d’à
côté. Manetti et Gordon se regardaient, se questionnant
silencieusement. La batte en alu ? Ils ne la virent pas. Elle
assomma Manetti et avant que Gordon puisse faire quoi que ce soit
(même s’enfuir aurait été une bonne chose pour lui), il
rejoignit son co-équipier sur le carrelage crasseux de la cuisine.
De l’heure, ils
s’en tapaient. De l’endroit où ils étaient, ils devaient s’en
douter.
Une cave.
Ce qu’ils
faisaient là par contre était un véritable mystère. Ils avaient
encore mal au crâne et sentait un filet de sang chaud couler
doucement sur leur nuque et leurs épaules. Ils ne pouvaient pas
bouger.
Mains liées.
Pieds…
également.
Gordon jugea la
situation et elle n’était pas brillante en plus d’être étrange.
Ils étaient en sous-vêtements, chacun sur un poteau de bois rond
enfoncé dans la terre de la cave, dos à dos, une ceinture de cuir
autour de la taille et une corde en travers du poitrail. Il ne voyait
rien d’autre.
– Enfin
réveillé, entendirent-ils.
Doug était assis
sur une table. Leurs habits étaient entassés à côté de lui.
– Je vais vous
donner un ou deux tuyaux, dit Doug. Ça vous aidera quand vous irez
sonner chez mes voisins pour essayer de les enculer.
– De quoi tu
parles ? voulut savoir Manetti.
– Ta gueule !
Tout d’abord, un flic fait le salut militaire quand il se présente
à un péquenaud. Ça en jette d’emblée, tu comprends ?
Ensuite, effacez le nom de l’entreprise qui a fabriqué vos
flingues factices et sachez que dans « police nationale »,
il y a un « e » à « nationale ».
Pour preuve, il
leur montra la plaque sur les chemises bleues. Effectivement, la
faute grossière les avait perdus.
– Enfin, quand
un type vous dit qu’il se pète la tronche au cannabis, vous
devriez lui pourrir la vie jusqu’à qu’il aille avouer qu’il a
baisé sa propre mère.
Manetti et Gordon,
si c’était bien là leur nom – et Doug en doutait – baissèrent
la tête en signe de capitulation. Le junkie tapa alors dans ses
mains, lançant les festivités.
– Bien ! Le
salut militaire, c’était des conneries bien sûr ! Mais vu
vos tronches, vous ne vous en doutiez même pas. Alors, je vous
explique, dit-il.
Il s’approcha de
Manetti.
– Vous êtes
reliés l’un à l’autre par un système ingénieux de câbles, de
cordes et de poulies. Pour le moment, vous êtes attachés à une
barre qui vous empêche de bouger. Normal puisque vous faisiez dodo,
je ne voulais pas que le système se déclenche. Je veux jouir du
spectacle ! Vous comprenez cela ?
Il donna quelques
tapes sur la joue de Manetti.
– Mais
maintenant, je vais vous libérer et seul votre équilibre vous
permettra de rester sagement sur cette poutre, légèrement
brinquebalante.
Il retira la corde
autour du torse de Manetti et la jeta dans un coin où elle disparut
dans la pénombre. Il resta un instant devant le soi-disant policier.
Ce dernier avait une ceinture de cuir autour de la taille. Une chaîne
y était accrochée et passait dans un anneau soudé à la barre et
se volatilisait dans un coffrage de bois.
– Si tu as le
courage de regarder au-dessus de toi, tu verras une lame aiguisée
par mes soins. Inutile de te dire que ça coupe. C’est pas du
bluff.
Manetti leva la
tête. Il confirma que son équilibre serait désormais sa seule
raison de vivre. La lame en question était artisanale, découpée
dans un morceau de fer. Elle paraissait lourde et effectivement bien
aiguisée. Il y avait encore des traces de sang dessus, preuve, s’il
en fallait une, que d’autres personnes étaient passées par ici
avant eux.
– Tu as vu ?
questionna Doug en détachant Gordon. Sache que ton pote à la même
au-dessus de la tête. Ce qu’il y a, c’est que j’ai dû me
mélanger les pinceaux parce que tu es relié à la lame de ton pote
et lui à la tienne. En fait, vous avez chacun la vie de l’autre
entre les mains. Celui qui se casse la gueule, tue l’autre. C’est
simple, c’est limpide, c’est génial !
Il retapa dans ses
mains, leur fit un salut militaire du pauvre en claquant des talons
et remonta les marches quatre à quatre. Il referma la porte derrière
lui et les deux faux flics se retrouvèrent dans le noir quasi
complet. Il y avait une faible lumière émanant du fond de la cave.
Une petite lucarne qui se trouvait à la limite du sol.
– Tu vas me
laisser pourrir ici, espèce de salaud, hein ? demanda Gordon.
– Ferme ta
gueule. Je t’aime pas mais c’est pas pour ça que je vais te
laisser te faire couper en deux. Maintenant, si tu insistes, je peux
arranger le coup !
Manetti regarda
autour de lui. Son équilibre le rappela à l’ordre. Il tendit les
bras et se stabilisa. Il continua son inspection. Il ne faisait pas
assez clair pour voir ce qui pouvait les sortir de là.
Comme si quelque
chose pouvait les aider ici ! Ils étaient au milieu d’une
cave. Impossible de se tenir quelque part. Le piège était pensé
depuis des années, à n’en pas douter. Combien de cobayes avaient
péri ici ? Combien avait glissé ? Combien avait abandonné
la partie ? Combien s’en était tiré ?
La porte s’ouvrit
derrière eux, un peu plus haut. Les planches de l’escalier de
fortune craquèrent. Doug avait un portable à la main.
– On se demande
« ce vous branlez », dit-il simplement en montrant le
texto affiché sur l’écran. C’est écrit mot pour mot.
Silence. Manetti
et Gordon étaient concentrés sur leur équilibre précaire.
– Pas grave, je
vais répondre, continua Doug. Allez… vous… faire… foutre…
connards ! Faut rester poli et si jamais vous revoyez cet
abruti, vous lui expliquerez que c’est déstabilisant de lire
quelque chose où il manque des mots.
Il envoya le
message avant de faire de même avec le téléphone qui explosa
contre le mur de pierre. Puis il baissa sa braguette et s’attela à
arroser copieusement le poteau sur lequel reposait Manetti. Celui-ci
ferma les yeux pour s’empêcher de réagir et de sauter du pilonne.
Oui, il détestait Gordon. Oui, il était un cambrioleur. Mais
certainement pas un assassin. Et il sentait que Gordon en était au
même point que lui. Peut-être qu’ils pouvaient se taper dessus
mais jamais ils ne se rabaisseraient à des instincts plus sauvages.
Il serrait les dents. On lui pissait dessus et il n’avait qu’une
envie – celle de sauter à la gorge de ce fou – à laquelle il ne
devait pas penser. Les bras écartés. Seul cela comptait pour garder
l’équilibre. Les bras écartés.
Et Doug repartit
en sifflotant.
Ils ne comptaient
plus les heures. Ils gardaient tant bien que mal les bras à
l’horizontal. Les douleurs gagnaient les mollets, les abdominaux,
les biceps. Ils transpiraient et à l’odeur de la sueur se mêlait
celle de la peur. La peur de lâcher prise et d’avoir une mort sur
la conscience.
– Pourquoi tu ne
sautes pas ? demandait Gordon.
Ça faisait
combien de fois qu’il lui posait la question ? Manetti n’en
savait rien. Par contre, il savait que ça le gonflait. Cette
question faisait de lui un assassin, la dernière des merdes, pire
que cet homme à l’étage au-dessus qui s’amusait de leurs
souffrances.
– La ferme je te
dis. Tu vas me tenter à force.
– Je ne sais pas
si je tiendrai le coup !
– Tu as tenu
jusque-là, tu tiendras encore !
– Je ne sais
pas ! J’en sais rien !
Quelques secousses
et… putain, ce con pleurait ! Il relâchait sa vigilance. Et
dans leur cas, « relâcher sa vigilance » signifiait
baisser les bras, au sens propre comme au sens figuré du terme. Si
la lame lâchait, il aurait le temps de la voir fondre sur lui. Il
aurait le temps de se dire qu’il allait crever à cause d’un
connard qui se la pétait en temps normal alors qu’il n’était
qu’une merde.
– Ecoute-moi !
Les sanglots
redoublaient dans son dos.
– ECOUTE-MOI !
cria-t-il.
Silence. Puis,
quelques reniflements.
– Si tu lâches,
c’est le taré du dessus qui gagne le jeu. Tu comprends ? Ne
lui fait pas ce plaisir ! Sauf si avoir ma mort sur la
conscience t’est plus agréable.
Il espérait ne
pas donner de mauvaises idées. Ils ne s’appréciaient pas tous les
deux. Et si cette suggestion devenait une excellente idée ?
Après tout, il avait tenu bon jusqu’à présent. Se pouvait-il
qu’il veuille le tuer ?
– Et si ça
l’était ? entendit-il.
La panique
montait. Il ne fallait pas. Il ferma les yeux, très fort, comme si
en faisant cela le cauchemar finirait par partir.
– Hein ? Et
si c’était agréable de savoir que je t’ai éliminé. Tu n’as
jamais été sympa avec moi, toujours à me rabaisser…
– Arrête tes
conneries…
– Toujours à te
foutre de ma gueule…
– Arrête je te
dis !
– Toujours à
jouer les petits chefs ! Tu n’es qu’une merde après tout !
Si tu fais cela, c’est parce que tu n’as pas assez de couilles
pour être le vrai chef !
– Ferme-là !
Un éclat de rire
lui répondit. Il se transforma à un rire quasi hystérique. Un
pétage de plomb qui, à coup sûr, n’allait pas se terminer sous
les meilleurs auspices. Manetti sentait déjà le froid de la lame
au-dessus de sa tête lui traverser les chairs. Il sentait sa peau se
déchirer, son sang couler, ses os se disloquer, comme s’il était
un foutu jouet en plastique. Et derrière, le rire se faisait plus
fou encore.
– Pauvre
connard ! criait Gordon. T’espérait quoi ? Que j’allais
attendre gentiment que tu me laisses la vie sauve ? Comme si tu
allais te sacrifier pour moi ! On se retrouvera en enfer !
Manetti hurla mais
son cri fut noyé par d’infernaux craquements, cliquetis,
grincements et grondements.
Gordon avait sauté
au bas du poteau.
À mi-parcours, la
chaîne dans son dos se tendit et le ramena à sa place, juste à
temps pour que la lame au plafond vienne le couper en deux, de la
tête au torse. Des sifflements accompagnèrent les chocs sourds des
flèches qui le transperçaient. Son corps s’affala sur le côté
et se balança, faisant trembler tout le dispositif.
Manetti, à peine
conscient d’être toujours vivant, se battait pour ne pas perdre
l’équilibre. Il n’avait pas tout suivi de la mort atroce de son
équipier mais il savait désormais que leur hôte avait menti. Il
était relié à sa propre mort (ou à sa propre vie, tout dépendait
de quel point de vue on se plaçait). La pisse encore fraîche qui
avait glissée sous ses pieds menaçait de l’envoyer à son tour
dans des bras métalliques avides de boyaux et de sang.
La porte de la
cave ne tarda pas à grincer. Doug survola les marches plus qu’il
ne les descendit et sauta autour du corps de Gordon… du moins ce
qu’il en restait. Manetti n’avait quasiment rien vu, hormis
quelques bouts d’os et de muscles voler dans tous les sens à côté
de lui. Il avait également senti une gerbe de sang le percuter et
couler dans son dos. Ce qu’il ne savait pas – outre le fait qu’il
ne voulait pas finir comme cet d’abruti de Gordon – c’était
que ce dernier avait eu les jambes tranchées net par deux autres
lames sorties de nulle part, qu’un couteau de boucher s’était
planté dans ses côtes, qu’une batterie de clous lui perforait
bras, jambes, tête, et c’était miraculeux que Manetti n’en ait
pas pris un.
Doug vint se
mettre devant Manetti.
– Je pensais
qu’il t’aurait sacrifié bien plut tôt.
Manetti ne le
voyait pas, ne l’entendait pas. Il pensait équilibre, équilibre,
équilibre.
– Le jeu
continue !
Le sang séchait
sur lui. Il coulait plus difficilement, ce qui lui donna des
frissons. En plus de devoir oublier que c’était un type qui lui
dégoulinait dessus, il devait retenir le moindre frisson, la moindre
sensation de grattement. Avec tout ça, il ne se rendit même pas
compte que Doug était reparti. Il fermait les yeux pour éviter de
vomir, pour se concentrer.
Quelque part, une
plaque tomba et le fit sursauter. Du moins, il pensa à une plaque vu
le bruit métallique. Une seconde, puis une troisième plus
rapprochée. Il chercha à regarder autour de lui, se tournant
lentement d’un côté puis d’un autre.
La lumière
provenant de la lucarne, plus loin dans la cave, ne suffisait plus
pour voir convenablement. Cependant, il avait la sensation que le sol
bougeait. Il entendit aussi des bruits inquiétants.
Ça grattait
quelque part.
Tout autour de lui
en fait. Il sentit quelque chose sur son pied gauche, puis sur son
pied droit. Ça grimpait. Le long de ses mollets, de ses cuisses. Ça
passait sous son vêtement. Il serra les dents. Il ne pouvait
qu’imaginer ce qui l’escaladait. Et ce fut un cauchemar. Cafards,
mille pattes, perces oreilles, fourmis… il voulut hurler et pensa
aussitôt à son équilibre. Encore une fois, il ignorait que son
imagination était bien chic par rapport à la réalité. Bien
entendu, il y avait quelques cafards qui lui couraient après.
Adorables bestioles comparées aux fourmis moissonneuses dont le
venin était 25 fois plus puissant que celui de la guêpe, des
scorpions rôdeurs de la mort – dont la piqure pouvait tuer
un enfant mais procurait de fortes douleurs à un adulte ainsi qu’une
insupportable fièvre provoquant convulsions et coma –, et
de l’araignée errante brésilienne. Joyeux zoo entomologique dont
Manetti ne soupçonnait rien. La première morsure de fourmi lui fit
comprendre que le jeu passait au cran supérieur. Il hurla à
plusieurs reprises, s’arrachant les cordes vocales et se demandant
ce qui occasionnait tant de souffrance. Les injections se
succédèrent, il transpira de plus en plus et il eut si mal qu’il
finit par ne plus rien ressentir. À moins qu’il ne soit tombé de
son mât.
Il entendit juste
un « swing » et puis… plus rien.
Doug ne se
précipita pas dans la cave. Il continuait de suivre sur son écran
les images que lui renvoyaient ses caméras à vison de nuit qu’il
avait disposées un peu partout dans la cave – pour ne rien perdre
de son jeu machiavélique. Il était plutôt écœuré que ce soit
déjà terminé. Il était assez bon physionomiste pour repérer les
parasites de la sorte de Manetti et Gordon. Mais souvent, il
surestimait leur instinct de survie.
Il resta sur la
dernière marche, mains dans les poches. Il avait allumé la lumière
et observait le millier d’insectes qui se trémoussait sur le sol
et sur sa machine infernal. Les corps de ses invités se balançaient
doucement au bout de leur chaîne.
Bien qu’il
donnait régulièrement à manger à ses insectes, leur loyauté
absolue envers lui n’était pas avéré. Il enclencha un
interrupteur et attendit que les bestioles aient fui les ultrasons.
Un ingénieux système qui les conduisait toutes dans un unique
endroit : un corridor aménagé tout autour de la cave et
accessible par des trappes disséminées aux quatre coins. Il restait
toujours un ou deux cafards jouant les rebelles mais le principal
était que les saloperies les plus venimeuses soient à l’abri. Ce
serait un comble que Doug claque au milieu de son système de mise à
mort si redoutable.
Il détacha les
carcasses des corps, mit le tout dans des sacs à gravas et les
traîna dans un recoin de la cave. Il souleva la trappe que personne
ne pouvait remarquer. Il examina l’eau qui se trouvait là. Elle
était calme. Pas pour longtemps. Il versa le contenu des sacs et
l’eau se mit à bouillir dans un fracas assourdissant. Il entendit
même les petites dents claquer. Il referma la trappe, laissant ses
piranhas faire le reste du travail.
Si un jour on
venait à le démasquer – ce qui arriverait probablement –, on
fouillerait cet endroit. On trouverait sa machine infernale. On
trouverait la trappe. Et si personne ne se faisait bouffer, en vidant
le caisson, on découvrirait un tas d’os humains.
Peut-être qu’une
vingtaine de personnes demeurait là, au fond, soigneusement
nettoyées par ces petits monstres aux dents acérées et à
l’estomac défiant toute concurrence.
_______________________________________________________________________________
_______________________________________________________________________________
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire